Les idoles brûlées

Dans la penderie mon habit de fantôme. Grisonnant, pâle d'être relégué au deuxième étage des guenilles de mi-saison ne bénéficiant que de ports intermittents : le matin, pour le trajet, puis le fond du sac. J'ai honoré mon statut de spectre souffrant avec trop de mansuétude pour la noblesse du crime accidentel. J'ai retiré le passionnel de la combinaison de qualificatifs hasardeux. Ce n'était qu'un abandon. Ce n'est qu'un étranger.

Les limbes ensoleillées se sont voilées d'un filtre adoucissant, d'un terne ronronnant, d'une colorimétrie ordinaire. Le bleu fait une percée. Le déchirant n'arrive plus qu'à provoquer une érosion légère du tissu qui fera la gloire de la garde-robe presque majeure, celle qui tient, celle qui résiste et se transmet, comme un doudou de fortune.

La trahison n'est plus. Caressée par une lucidité insidieusement chaque jour plus habile, elle finalise sa mutation en odieux conte à peine plus original que le récit digestif à la table du jardin endimanché. C'est l'histoire d'une illusion bien fabriquée, que j'ai embrassé, à laquelle j'ai fait l'amour, que j'ai serré, trop fort, avec trop de hargne. C'est une berceuse sournoise, qui n'endort que trop bien, qui déguise les songes d'apparats de contrefaçons, de pastiches de rêves. Je ne suis plus sensible à sa mélodie. Brunie et enferrée, acharnée à l'affranchissement, je sais enfin, mériter mieux, me fondre dans la masse peinée ainsi sanglotante qu'elle s'est battue et a gagné : le sort et l'horizon.