La ville morte – épisode 4 / la pluie
La lumière des lampadaires bave et déborde. Sans forme fixe, des tâches lumineuses glissent sur la chaussée. Des micro paysages se dévoilent et nous promettent des futurs pluvieux.
La lumière se répand faiblement et nous colle. Des eaux volantes s'élancent, je voudrais les toucher. Leurs mystères se chuchotent et roulent contre le bus. Le fioul mélangé à l'eau créé des arcs-en-ciel sans soleil et sans trésor.
Le bus est lent. La traversée des quartiers se fait par tranche de pluie. Les barres d'immeubles reflètent l'eau dans leurs grandes fenêtres. Les façades sont liquides. Le béton ressemble à des pâté de sable humide.
Chaque rasade révèle l'entrée d'un nouveau personnage dans le bus. Des pas se hâtent à la poursuite du bus, une main s'écrase contre la vitre et tape une fois, deux fois, alors qu'il redémarre. Couinement, arrêt. “Merci monsieur hein. Merci !” dit une voie forte. L'humidité entre dans le véhicule. L'atmosphère ne se rafraîchit pas, il fait moite comme dans un moteur.
Une tranche de pluie à la fois, les immeubles changent. Les haussmanniens apparaissent, le béton s'orne. Les pistes cyclables resurgissent. Il y a moins d'espace et pourtant il y en a plus.
La pluie roule davantage. Les bus de différentes lignes se croisent. La ville morte sourit les trombes.
Il pleut sur la ville morte.