Ces histoires-là
Hier, c'était la journée internationale de la santé mentale le jour où tout le monde a un petit avis sur la question de la santé mentale et veut briser le tabou
Très important ça briser le tabou.
Mais de quel tabou parle-t-on ?
C'est marrant cette histoire de tabou parce que, en me renseignant un peu, j'ai trouvé des témoignages très anciens.
par exemple
On retrouve des traces babylonienne d'une maladie appelée peine de coeur (ḫīp libbi) qui ressemble à la dépression et à l'anxiété
voilà une traduction approximative :
“J'ai mal au cœur et des frissons, je suis constamment dans un état anxieux, j'ai peur, je parle seul.e, je cauchemarde.”
Plus tard, Aristote dans Les Problèmes parle d'un étrange mal :
être trop fatigué pour vivre.
Alors de quel tabou parle-t-on ?
Un tabou c'est quelque chose qui ne peut être dit. Or les personnes concernées parlent manifestement depuis très longtemps
Alors hypothèse :
Peut-être que vous ne voulez pas écouter ces histoires-là ?
Vous préférez écouter d'autres histoires faites de faits divers juteux et d'escape games dans les asiles
Au début, je pensais que vous aimiez ces histoires parce qu'elles vous faisaient peur
mais
je ne pense pas que ça vous fasse vraiment peur
vous n'avez pas vraiment peur de mourir assassiné.e par un fou, une folle
ce qui vous fait peur c'est
de louper votre vie
de ne pas être productif.ve
de vous retrouver seul.e du fait de la maladie
c'est pour ça que vous n'aimez que ces formes de folie bien créatives bien productives
ah Van Gogh !
ah les hauts potentiels !
ah les personnes autistes si concentrées !
les hallucinations sensorielles
les obsessions
les jours où on a mal partout
ça c'est la folie qui vous fait peur
vous avez peur
de pas pouvoir vous lever du lit
de voir des trucs que vous êtes seul.e.s à voir
vous avez peur
que le jour où vous déraillez
il n'y ait personne à vos côtés
alors vous dites :
c'est fou (lol) ce tabou autour de la santé mentale on va faire des événements pop et des applis fun pensées par des gens bien dans leur tête
et ainsi faire diversion de ce qui vous fait vraiment peur avec la folie.
la solitude
la non productivité
la souffrance
Alors que, quand on est déjà de l'autre côté on sait que
quand on déraille des gens sont là
des vrais gens
qui vous appellent tous les jours
qui viennent vous aider à faire la vaisselle
qui vous accompagne à l'HP
Alors, on va continuer à lever les yeux au ciel quand on entend des incantations vides et autres mots valises
parce qu'on sait qu'ailleurs, il y a des gens qui sont là qui écoutent qui font
et étrangement ce ne sont pas ceux qu'on entend discourir sur la fin du tabou
en santé mentale :
peut-être parce qu'ils et elles sont trop occupé.e.s
à agir concrètement.