Leos Carax ou l'ego trip pavé de mauvaises intentions
Annette, de Leos Carax n'a pas été un film difficile à regarder. La musique de Sparks, Adam Drivers et la beauté des couleurs aident. Pour tout le reste, c'est le naufrage. Cela faisait longtemps que je n'étais pas sorti du cinéma en me disant : c'était vraiment un mauvais film. Ce n'est pas tant l'assemblage, l'humour loupé ou même le jeu des acteurs qui m'a frappé, mais l'intention du film qui ne va pas.
L'histoire est simple : un comique rencontre une soprano, ils s'aiment very very much (une chanson de 6 minutes leur est consacré), ils ont une enfant, il est accusé de frapper ses précédentes partenaires, il tue sa femme, il tue l'amant de sa femme, il fait de son enfant un enfant-star, il va en prison et donne à son enfant des conseils sur la vie très utiles comme : ne contemple jamais l'abysse. La gamine à 8 ans et lui répond ok papa. Fin. Ah oui et sa femme le hante aussi, mais ça ne fait pas trop partie de l'histoire.
Toute cette intrigue est en fait un support à un ego-trip masculin loupé. Le personnage principal nous répète tout au long du film : “Regardez-moi, regardez ma noirceur, moi qui ai contemplé l'abysse, moi qui détruis tout, moi moi moi”. Un homme blanc cis hétéro qui se regarde le nombril doit vraiment avoir quelque chose de nouveau à dire pour considérer que cela vaut le coup qu'on passe 2h20 à ses côtés. Et ce n'était pas le cas. On est sur une victimisation d'un mec qui tue sa femme et qui est finalement dénoncé par sa fille (“daddy kills people”, scène qui entre dans mon panthéon personnel des navets).
Dans la liste des choses que j'ai le plus détesté dans ce film :
– l'absence total de personnalité des personnages féminins (qui ont d'ailleurs le même prénom sous prétexte d'être mère & fille) ainsi que le codage de couleur en vierge Marie (bleu et blanc). Elles ne sont qu'un miroir au personnage masculin, qui a besoin d'aimer quelque chose. Et qui quand il aime, devient “malade”. Il y a tant de choses à dire sur notre passion pour les romances toxiques et à la place on nous dit ... rien de nouveau
– le fait que tout soit décrit, rien ressenti : Leos Carax fait un essai sur le cinéma, pas du cinéma
– la multiplicité des thèmes jamais aboutis (violences domestiques, #metoo avec des actrices qui témoignent, le lien audience, l'exploitation des enfants dans le spectacle, la critique des comédies musicales lisses)
– l'humour très mal maîtrisé sur les violences domestiques (vraiment, si tu vas dans cette direction, il faut bosser)
– le fait que le personnage d'Adam Driver devienne de plus en plus laid avec la descente aux enfers du personnage. Ça et les deux tâches de vin sur son visage qui représentent ses meurtres ... franchement ?
– le fan service Adam Driver : la scène est mauvaise ? Et si on mettait Adam Driver à moitié nu ça passera mieux
Bref, si vous voulez me faire changer d'avis n'hésitez pas à m'écrire, car après avoir lu les critiques de rotten tomatoes je me pose des questions.