Chroniques d'un terrien en détresse – Le blog personnel de Zéro Janvier

Imperium (Frédéric Lordon)

Que faire des idéaux que sont l’internationalisme, le dépérissement de l’Etat et l’horizontalité radicale ? Les penser. Non pas sur le mode de la psalmodie mais selon leurs conditions de possibilité. Ou d’impossibilité ? C’est plutôt la thèse que ce livre défend, mais sous une modalité décisive : voir l’impossible sans désarmer de désirer l’impossible. C’est-à-dire, non pas renoncer, comme le commande le conservatisme empressé, mais faire obstinément du chemin. En sachant qu’on n’en verra pas le bout.

Les hommes s’assemblent sous l’effet de forces passionnelles collectives dont Spinoza donne le principe le plus général : l’imperium – « ce droit que définit la puissance de la multitude ». Cet ouvrage entreprend de déplier méthodiquement le sens et les conséquences de cet énoncé. Pour établir que la servitude passionnelle, qui est notre condition, nous voue à la fragmentation du monde en ensembles finis distincts, à la verticalité d’où ils tirent le principe de leur consistance, et à la capture du pouvoir. Il ne s’en suit nullement que l’émancipation ait à s’effacer de notre paysage mental – au contraire ! Mais elle doit y retrouver son juste statut : celui d’une idée régulatrice, dont l’horizon est le communisme de la raison.

Voici encore un livre très intéressant de Frédéric Lordon, même si je dois avouer que j'ai parfois dû m'accrocher pour suivre sa pensée quand il mobilise des concepts philosophiques de Spinoza, d'autant qu'il adopte par moments un style un peu abscons.

C'est brillant et intellectuellement très stimulant, j'ai d'ailleurs surligné des paragraphes entiers sur ma liseuse, mais j'ai parfois ressenti ce sentiment de culpabilité du pseudo-intellectuel qui réfléchit sur de grandes concepts et propose de belles idées pour repousser le moment de devoir s'atteler personnellement à les mettre en pratique, laissant la sale besogne à d'autres.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

Discuss...