Tu seras mon père (Metin Arditi)
J'avais lu deux romans de Metin Arditi il y a quelques années, sans en garder de souvenir marquant. Son nom me disait tout de même quelque chose quand j'ai vu son nouveau roman sur la table d'une librairie indépendante qui vient d'ouvrir dans ma commune. La quatrième de couverture m'a attiré et je me suis laissé tenter. Je ne le regrette pas, car c'est un magnifique roman.
Le récit commence à l'été 1978. Renato, le personnage principal, a sept ans quand son père qu'il adore, patron d'une entreprise florissante de glaces italiennes, est enlevé par les Brigades Rouges. Il est libéré quelques semaines plus tard mais, traumatisé par son expérience en captivité, il finit par se suicider. Sa veuve, son fils Renato et la gouvernante Rosa, qui élève les fils de la famille depuis deux générations, partent s'installer en Suisse pour fuir le théâtre de cette tragédie.
Dix ans plus tard, la mère de Renato repart en Italie pour épouser l'avocat de la famille, laissant son fils dans un pensionnat prestigieux. Il y rencontre Paolo, un professeur italien qui anime les séances de théâtre, un art que Renato pratique avec passion depuis plusieurs années. L'homme et l'adolescent tissent une relation de confiance et d'admiration mutuelle, jusqu'à ce que le passé ne surgisse et ouvre une fissure entre eux.
Le récit couvre une période de près de vingt ans, même si l'essentiel du roman, au moins en nombre de pages, se déroule dans les années 1989-1990, au coeur de la relation entre Renato et Paolo dans le cadre de pensionnant suisse qui attire les enfants de la haute bourgeoisie européenne voire mondiale.
C'est un roman au style sobre mais qui vise juste, au service d'un récit aussi captivant qu'émouvant. Je l'ai lu entre hier après-midi et ce matin et j'ai eu chaque fois du mal à m'arrêter quand mon agenda me contraignait à interrompre ma lecture. Chaque court chapitre donne envie de lire la suite, sans que cela soit construit avec un suspense artificiel. C'est simplement le récit lui-même qui se déroule naturellement et que l'on a envie de suivre jusqu'au bout, d'une seule traite.
Il me semble que tout le roman tourne autour de la question de la parentalité. Dans une moindre mesure de la maternité, même si le sujet est présent avec les figures contrastées voire antagonistes de Rosa, la gouvernante, et de la mère de Renato. C'est surtout le thème de la paternité qui parcourt tout le récit, de la mort du père jusqu'à la relation de Renato avec Paolo, ce père de substitution qui suscite l'admiration et l'affectation avant de décevoir.
J'ai passé un très beau moment de lecture avec ce roman. J'ai été franchement ému en lisant certains passages, à la fois par les thématiques abordées et par la délicate pudeur avec laquelle l'auteur transmet les émotions de ses personnages. Une très belle surprise.
Zéro Janvier – @zerojanvier@diaspodon.fr